Accord de gouvernement flamand: le milieu associatif et les syndicats réagissent

Jambon 1er braque à fond à droite et attaque frontalement le milieu associatif qui se montre critique. Les citoyens qui s'unissent pour obtenir un changement constituent toutefois une partie cruciale de notre société pour défendre et faire progresser l'État-providence et nos droits fondamentaux. Aperçu des réactions.

Les associations et organisations de terrain ont été créées pour, au départ de leur expérience dans la pratique, remédier aux problèmes structurels de notre société. Sans syndicats, il n'y aurait pas de salaire minimum ou de congés payés ; sans organisations de lutte pour les droits des femmes, les femmes n'auraient pas obtenu le droit de vote ; sans organisations LGBTQI+, le mariage et l'adoption pour tous seraient toujours impossibles, etc. etc. Si le gouvernement étouffe le milieu associatif, qui pourra encore tirer la sonnette d'alarme quand les pouvoirs publics manquent à leur mission ?

« La lutte contre la pauvreté devient une lutte contre les pauvres »

Pour le gouvernement flamand, si on se retrouve dans la pauvreté, c'est sa propre faute

« L'accord de gouvernement colorie en noir et jaune, mais les chiffres de la pauvreté, eux, restent dans le rouge très vif », constate Jos D’Haese, chef de groupe PTB au Parlement flamand. Les nouveaux arrivants doivent attendre au moins 5 ans avant de pouvoir s'inscrire sur une liste d'attente pour un logement social et 10 ans avant d'avoir droit à la protection sociale flamande.

Celui qui est depuis deux ans au chômage – par exemple les plus de 55 ans qui ont été licenciés et qui retrouvent très difficilement un emploi – devra obligatoirement effectuer un travail au service de la collectivité. Cette sorte de travail obligatoire détruit encore davantage d'emplois à part entière et intensifie la chasse aux chômeurs.

« La lutte contre la pauvreté devient une lutte contre les pauvres, résume Netwerk Tegen Armoede (le réseau flamand de lutte contre la pauvreté). Si on veut vraiment faire reculer la pauvreté, c'est d'autres choix qu'il faut opérer : une facture maximum dans l'enseignement secondaire, suffisamment de logement abordables et d'emplois de qualité. » Les services sociaux sont démantelés et les gens sont priés de se débrouiller. La « responsabilité individuelle » remplace une politique sociale structurelle. Selon le gouvernement flamand, si on se retrouve dans la pauvreté, c'est sa propre faute.

La politique de la diversité fait place à une politique de symbole jaune-noir

« Ces mesures toucheront justement les plus vulnérables et elles auront un effet inverse sur leur intégration »

Le nouveau gouvernement flamand va mettre fin à la collaboration avec Unia, le Centre interfédéral pour l'égalité des chances, et assécher le financement du Forum des minorités. Les initiatives centrées sur les associations ethniques-culturelles ne recevront plus de subsides à l'avenir. « C'est inadmissible », s'indigne Ivy Goutsmit, le coordinateur de la Fédération des associations socioculturelles des personnes d'origine immigrée (FMDO). « Nous touchons précisément un public-cible que ne touchent pas les organisations régulières, et nous construisons des ponts entre les différents communautés et les gens qui sont et qui ne sont pas d'origine immigrée. »

L'arrêt du soutien à Unia et aux organisations de migrants est directement tiré du plan en 70 points de ce qui s'appelait à l'époque le Vlaams  Blok. « C'est là un exemple d'école d'une politique de symbole. On s'en prend aux associations ethniques et culturelles alors que celles-ci sont par excellence des  bâtisseuses de ponts », observe Landry Mawungu, directeur du Forum des minorités.

« Le sentiment existe que les charges et les avantages ne sont pas répartis de manière équitable », a déclaré le tout nouveau ministre-président Jan Jambon lors de la présentation de son nouveau gouvernement. Il n'évoquait pas là les plantureux salaires des politiciens et des CEO mais les nouveaux arrivants.  Le parcours obligatoire d'intégration coûtera dorénavant 360 euros à chaque personne. Les réfugiés reconnus n'auront plus droit à des allocations familiales pendant une certaine période. « En durcissant le ton et en s'en prenant symboliquement aux personnes d'origine immigrée, on dissimule les vrais problèmes. Ces mesures toucheront justement les plus vulnérables et elles auront un effet inverse sur leur intégration », souligne Mawungu dans sa réaction.

Une ambition climatique à la mesure des gros pollueurs

L'objectif de réduire les émissions de CO2 de 100 % pour 2050 est diminué à 80 %

Au plan de l'ambition climatique, le score du nouveau gouvernement flamand est plus que médiocre. Il n'y aura pas de normes plus strictes pour les multinationales, pas d'investissements obligatoires dans l'énergie durable ou l'économie circulaire. L'objectif de réduire les émissions de CO2 de 100 % pour 2050 est diminué à 80 %. Le gouvernement flamand veut doubler la quantité d'énergie solaire et éolienne d'ici 2030, mais cela signifie toujours une proportion d'à peine 13 %.

 « La réduction des émissions de 80% pour 2050 est une promesse vaine, s'indigne l'organisation de défense de l'environnement Bond Beter Leefmilieu. Sans les mesures suffisantes et adéquates, les émissions ne diminueront pas. » Lien Vandamme, de 11.11.11, se montre également critique : « Le nouveau gouvernement flamand doit assumer une plus grande responsabilité dans cette crise mondiale, en réduisant les émissions de manière drastique et en contribuant à la lutte mondiale contre les conséquences de la crise climatique. »

L'attaque contre le statut des fonctionnaires passe à la vitesse supérieure

« La pression de travail est très forte et le nombre de burn-out a grimpé »

La CGSP réagit vivement à l'accord de gouvernement. Le syndicat qualifie cet accord d' « attaque directe contre le statut et les conditions de travail du personnel ».  Et cela alors que le précédent gouvernement avait déjà rapproché ce statut de celui des contractuels, entre autres en ce qui concerne le règlement des vacances et de maladie.

Le « nouveau-ancien » gouvernement veut désormais « supprimer le statut des fonctionnaires et engager uniquement de manière contractuelle ». Ce qui , pour la CGSP Services publics, est « inacceptable ». Les économies effectuées par le précédent gouvernement ont déjà supprimé 4 000 postes dans la fonction publique, et les fonctionnaires le ressentent fortement. Ils subissent une forte pression de travail et le nombre de burn-out a grimpé. La CGSP constate que cela n'empêche pas ce gouvernement de planifier de « nouvelles économies » et de vouloir transformer « certains services de la fonction publique en services gérés comme dans les entreprises privées ».

Enfin, des concepts figurant dans l'accord de gouvernement comme « continuité des services » ou  « garantir les services » font suspecter à la CGSP que le gouvernement flamand « veut instaurer le service minimum dans divers domaines ».  Pour la CGSP, il ne s'agit pas ici de sécurité, « mais d'une attaque contre le droit de grève, ce qui est inadmissible. »