Les travailleurs de la chimie en action pour que l’année « particulièrement bonne » ne profite pas qu’aux actionnaires
21 Avril 2017
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Chimie/PétroleLa fédération patronale du secteur des entreprises chimiques et pharmaceutiques vient de faire connaître ses chiffres annuels. « Une année particulièrement bonne », semble-t-il. Du coup, les patrons veulent poursuivre sur leur lancée et proposent d’augmenter la flexibilité tout en compressant les salaires. La journée d’action du 18 avril dernier a pu leur donner une idée de ce qu’en pensent les travailleurs…
Mardi 18 avril, les travailleurs de la chimie et du secteur pharmaceutique ont mené une action. 500 manifestants des différents syndicats se sont rassemblés pour la fête annuelle de la fédération sectorielle Essenscia, à Bruxelles. Plusieurs entreprises comme Agfa-Gevaert, Schulman, Pfizer et Alcon, ont connu une grève bien suivie et, dans d'autres entreprises comme Monsanto, il y a eu des interruptions de travail. Dans le Sud du pays aussi, des entreprises se sont mises à l'arrêt, comme chez Baxter et Shire, à Lessines.
« Ils font de l'argent, pas à la pelle, mais au bulldozer »
Les années précédentes, le secteur a versé plus de 60 % du résultat net en dividendes
La fédération sectorielle venait de publier ses chiffres annuels, et ne pouvait cacher sa satisfaction : « Le secteur de la chimie et des produits pharmaceutiques a une année particulièrement bonne derrière lui. Ainsi, le volume d'affaires a grimpé à un niveau record de près de 65 milliards d'euros. » Les années précédentes, le secteur a versé plus de 60 % du résultat net en dividendes. Les travailleurs sont parmi les plus productifs du monde, ils travaillent en régime continu, 7 jours sur 7 et 365 jours par an. À la question de savoir si 2016 a été une année record, le grand patron actif dans le port d’Anvers Fernand Huts a répondu : « Nos clients dans la chimie et la pétrochimie s'en sortent à merveille. Ils font de l'argent, pas à la pelle, mais au bulldozer. Le prix de leur produit de base, le pétrole, a baissé énormément, mais ils parviennent à maintenir les prix de vente très stables. Cela signifie donc des marges multipliées par dix ! »
Ce n’est cependant toujours pas assez pour certains. Ainsi, avec Essenscia, elles veulent inscrire dans les conventions collectives de travail du secteur qu’on ne pourra en aucun cas dépasser la norme salariale de 1,1 %. Si les travailleurs d’une entreprise réussissaient à négocier plus que cela, l'augmentation du salaire minimum, aujourd’hui surtout d'application dans les plus petites entreprises du secteur, ne pourrait se poursuivre. Autant dire que les négociations salariales ne sont pas vraiment « libres ».
Le texte parle de porter le seuil des heures supplémentaires à 443 heures par an et la limite de la semaine de travail à... 84 heures.
Mais il n'y a pas qu'à propos des augmentations salariales que la concertation bloque. La fédération sectorielle a mis sur la table un cahier de revendications sans précédent : 180 pages, dans lequel elle demande d'étendre encore la flexibilité. Les conditions de travail dans le secteur sont déjà parmi les plus flexibles. Le texte parle de porter le seuil des heures supplémentaires à 443 heures par an et la limite de la semaine de travail à... 84 heures.
Gâter les actionnaires et ne rien accorder aux travailleurs
Le point de vue d'Essenscia montre clairement qu'elle entend bien gâter ses actionnaires, mais ne rien accorder à ses travailleurs. Lors de l'action à Bruxelles, une délégation syndicale a été reçue par Essenscia. La fédération patronale a fait savoir qu'elle voulait reprendre les négociations sectorielles dans de brefs délais afin de parler du cahier de revendications des salariés. En même temps, les syndicats se réunissent les 20 et 21 avril, et il sera notamment question de la suite du plan d’action.
Sans les travailleurs, la richesse qui permet aux actionnaires de toucher de généreux dividendes ne serait pas créée. Il est donc assez logique qu’ils en bénéficient aussi. C’est dans cette optique qu’au minimum, on devrait s’attendre à ce que l’augmentation salariale de 1,1 % soit comprise dans la convention sectorielle, et qu’elle touche donc aussi les petites entreprises où il n’y a pas de délégation syndicale. Quand aux négociations salariales, il ne peut y avoir de chantage comme tente de l’appliquer la fédération patronale, elles doivent rester libres.
Essenscia continue à faire du lobbying pour de nouveaux milliards
Les multinationales du secteur ont toute la droite dans leur poche. La loi salariale qu'elles ont obtenue via leur lobbying a été approuvée entre autres par la N-VA, le CD&V, l'Open VLD et le Vlaams Belang. Jamais encore elles n'ont été aussi chouchoutées par la législation et les privilèges fiscaux. Pas de quoi satisfaire leur soif de profit. « Avec le tax shift et la déduction pour innovation, le gouvernement a déjà franchi des étapes importantes et nous espérons qu'il continuera d'appliquer les réformes nécessaires, comme celle de l'impôt sur les sociétés », insiste ainsi Wouter De Geest, patron de BASF.
En 2015, les seuls Solvay, Janssen Pharmaceutica, Bayer et Total Petrochemicals et Refining ont encore reçu des réductions fiscales pour plus de 1,2 milliard d'euros. Au lieu du tarif officiel de 33,99 %, ces multinationales ont payé entre 0 et 3,5 % d'impôt. « Il y a toujours moyen de payer moins » semble être leur leitmotiv.
Outre une diminution de l'impôt des sociétés, la fédération demande également l'introduction d'une norme de l'énergie. À travers celle-ci, le gouvernement rembourserait aux entreprises le surcoût par rapport aux pays voisins, tout en le facturant une fois de plus à la population.
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